L’éco-anxiété et ses remèdes
Crédit Photo : Kelly Sikkema
L’éco-anxiété, c’est quoi ?
Premièrement, d’où ça vient ?
Que l’on soit sensible à l’écologie grâce à un reportage, un livre, un film, une Fresque du Climat, notre sensibilité à la nature, une connaissance ou bien tout ça à la fois, on passe généralement (voire régulièrement) par des phases où « on voit tout en noir ». Mesdames et messieurs, je vous présente l’éco-anxiété !
Ainsi, l’éco-anxiété pointe le bout de son nez quand on est choqué.e.s par le journal télé qui trouve ça chouette de pouvoir se baigner en février, le voisin qui va chercher son pain en SUV ou qui jette son mégot par terre, les publicités pour la fast-fashion et les week-ends à Dubaï…
Nous sommes de plus en plus sensibles aux mauvaises nouvelles que nous apportent les scientifiques et les journalistes. Parfois au point d’en être si bouleversé.e.s qu’on n’arrive plus à s’y confronter car ça devient trop dur à porter. Ou bien à l’inverse on n’arrive plus à s’en détacher et on finit par tourner en boucle jusqu’à s’en faire mal.
C’est grave docteur ?
C’est la chercheuse Véronique Lapaige qui a défini dès 1996 l’éco-anxiété comme un « stress pré-traumatique » qui se traduit par un sentiment d’inquiétude voire d’angoisse provoqué par les bouleversements actuels et/ou les menaces qui pèsent sur l’environnement.
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Selon un sondage IFOP, 67% des Français déclarent ressentir de la peur face à l’avenir. En général, cette peur se manifeste à travers plusieurs émotions :
- la colère : souvent liée à un sentiment d’injustice quant au fait de devoir assumer les conséquences des choix des générations précédentes et à l’impression que les dirigeants politiques ne sont pas à la hauteur ;
- la responsabilité : voire la culpabilité, mais aussi l’idée d’assumer sa part de responsabilité à son échelle ;
- la combativité ou au contraire la résignation : faire face aux défis ou bien se dire qu’il est trop tard ;
- et plein d’autres sentiments.
En bref, l’éco-anxiété a beaucoup de causes et d’expressions différentes.
Et vous, vous en êtes où ? À ce propos, l’association On Est Prêt a mis en place la campagne « Tu flippes ? » pour sensibiliser sur le sujet. Mais aussi et surtout : aider. Donc, si cela vous intéresse, pour un petit « état des lieux » personnel, c’est par là.
L’éco-anxiété, comment s’en sortir ?
Trop, c’est trop !
Afin de casser ce cercle vicieux, rien de tel que d’en sortir vraiment. Alors, disons « stop » et allons prendre l’air ! Sortir de sa routine et s’ouvrir vers l’extérieur permet d’avancer et de retrouver un état d’esprit plus apaisé.
Partager le « sac à dos » de l’éco-anxiété
D’abord, la première étape avant toute action, c’est de parler de ce qu’on ressent. En effet, mettre des mots sur ses émotions permet de les extérioriser pour mieux les comprendre. Le fait de les partager aussi avec quelqu’un est une manière d’alléger le « fardeau » : vous n’êtes pas seul.e ! Que la personne qui nous écoute ressente la même chose ou pas, c’est déjà un premier pas d’en discuter ensemble, d’avoir un autre point de vue.
Crédit Photo : Double P
Au delà de la discussion et du partage d’émotions, aller vers l’autre signifie aussi aller vers d’autres milieux, voir et expérimenter des choses différentes.
Aller voir ailleurs si l’herbe est plus verte
Il faut souligner que cette ouverture aux autres (personnes, lieux ou expériences) a plusieurs échelles : notre cercle familial et amical, nos collègues… jusqu’à des personnes rencontrées dans un contexte très différent de notre quotidien.
Donc cela peut être tout près de chez soi, comme aux « apéros paumé.e.s » de Make Sense ; ou bien dans une région ou un pays différent.
Montaigne a dit « il faut voyager pour frotter et limer sa cervelle contre celle d’autrui ».
Comme le souligne Montaigne, les échanges culturels nous enrichissent, et en prenant le temps de découvrir en voyage, on rencontre les habitants locaux, on échange (merci Google Traduction) et on comprend mieux leur quotidien, leur point de vue.
C’est d’ailleurs l’un des aspects majeurs du slow travel (voyage « lent »).
Déconnexion
L’éco-anxiété partout, tout le temps
L’un des aspects de l’éco-anxiété qui la rend si spécifique est ce sentiment d’urgence et en même temps d’impuissance.
En effet, les réseaux et les médias, par leur omniprésence dans notre quotidien – et surtout dans notre téléphone ! – sont très orientés vers l’immédiat et l’information « en continu ».
Une étude We Are Social montre que nous passons en moyenne dans le monde, 7 heures par jour devant un écran ! C’est-à-dire 42% de notre temps éveillé et parmi ces heures, plus de la moitié sur mobile.
Ça vous paraît énorme ? Les scientifiques ont prouvé que l’utilisation des écrans augmente le stress ainsi que les problèmes de santé qui en découlent. Ensuite, ajoutez à cela l’aspect dérèglement climatique et toutes ses mauvaises nouvelles, voici un magnifique cocktail toxique.
Stop !
Alors, quand notre état de santé commence à s’en ressentir (troubles du sommeil, maux de ventre, irritabilité, perte d’appétit…) il faut savoir dire stop ! A cette fin, un moyen radical mais efficace : couper son téléphone, le laisser à la maison et DÉ-CON-NEC-TER.
De surcroît, au delà de l’addiction au téléphone et à internet, l’éco-anxiété développe un sentiment de responsabilité qui se traduit parfois par une culpabilité à vouloir « couper » des informations.
Pourtant, c’est en prenant soin de soi qu’on sera en mesure de prendre soin des autres et de la nature.
Et il est tout à fait possible de prendre soin de soi sans détruire la planète !
Bon, mais qu’est-ce qu’on fait maintenant ?
Alors, pour une petite pause – quelques heures, cela peut être simplement écouter de la musique, lire, regarder un film, jardiner, cuisiner, se promener, passer du temps avec ses amis ou sa famille, tricoter, jouer au dominos, faire du sport, de yoga ou de la méditation… inventez la liste qui vous correspond !
Mais si vous avez besoin d’un plus grand break, pour couper du monde pendant quelques jours / semaines, on vous propose d’essayer les « vacances déconnectées ». Pour cela, pas besoin d’aller en dans la pampa argentine sans réseau (et encore, on y capte pas trop mal!).
Crédit Photo : Austin Schmid
À cet égard, voici quelques pistes pour lâcher son téléphone :
- L’éteindre ou le laisser à la maison.
- Aller dans un endroit où il n’y a pas de wifi (le site EcoOndes recense les hébergements qui n’ont ni wifi ni antenne relais à proximité) ou pas de réseau mobile.
- Ne plus passer des heures sur internet à chercher où aller et comment : laissez-vous porter par nos boucles itinérantes en mode slow travel qui laissent la part belle aux étapes hors des sentiers battus pour des surprises inoubliables : n’est-on pas toujours plus marqué par les lieux et les moments inattendus et sans idées pré-conçues ?
- Se fixer des règles : bloquer les notifications Google News et réseaux, mettre des limites de temps par application, ou désinstaller les plus addictives, mettre le téléphone en mode avion la nuit et/ou à certains moments de la journée…
Bref, reconnecter avec « the real life (le monde réel) » (nos ancêtres nous prendraient vraiment pour des fous…).
Reconnexion
Reconnexion à la nature face à l’éco-anxiété
Les scientifiques sont unanimes : le fait de se promener dans la nature nous fait du bien !
En effet, depuis les études japonaises sur les bienfaits du « shinrin-yoku (森林浴) » (« bain de forêt »), dès les années 1990, les études comme du Dr Louis Bherer par exemple, n’ont cessé de démontrer que le contact avec la nature, notamment la marche en forêt, permettent de réduire le rythme cardiaque et la pression artérielle ainsi que le taux de cortisol (hormone du stress).
Crédit Photo : Axel Holen
Renouer avec le monde naturel auquel nous appartenons (en l’oubliant trop souvent), voilà de quoi nous recentrer sur l’essentiel et nous redonner espoir. Notre civilisation très urbaine nous a coupé de la nature : la part qu’on lui « donne » en ville n’est qu’ornementale, quelques fleurs pour faire joli, même si ça commence à changer timidement. Notre société citadine ne s’est pas soucié de la destruction de la biodiversité car elle l’avait déjà éloigné d’elle.
Certains oublient complètement la nature, croyant pouvoir vivre sans elle ; tandis que d’autres ont perdu tout espoir de la protéger. Pourtant, c’est en vivant de façon plus harmonieuse avec les autres espèces vivantes, animales ou végétales, en cohabitant que l’on trouvera la seule solution durable pour tous.
Mieux comprendre les mécanismes de la biodiversité permet de mieux la protéger, et pour cela la Fresque de la Biodiversité est une bonne porte d’entrée.
Différence entre biodiversité protégée et ordinaire
Cela permet notamment de distinguer :
– la biodiversité protégée : celle qui est presque « figée » dans des parcs nationaux et réserves naturelles dans le monde ;
– et la biodiversité « ordinaire » : celle de nos milieux ruraux et agricoles, de nos jardins et parcs.
D’un côté, concernant la biodiversité protégée, nous avons la chance d’avoir de très nombreux espaces et parcs naturels en Europe , de quoi se ressourcer sans prendre l’avion.
Mentionnons que la superficie d’espaces naturels protégés en Europe a été multiplié par 6 entre les années 1980 et les années 2010, passant de 3 % à 21 % de la superficie totale du continent (European Economic Area, EEA – source).
Certains parcs mettent aussi en place des systèmes de quotas pour les protéger de la sur-fréquentation, comme les Calanques depuis le 17 juin 2023. De fait, ceci est bénéfique à certaines espèces animales sauvages, comme les bouquetins et chamois, les biches et cerfs, les sangliers, les loutres, les lynx, les phoques, les ours, les baleines, les cygnes, les oies, les grues, les aigrettes, les pélicans, les aigles… (étude passionnante à ce sujet par Rewilding Europe).
Voilà de belles explorations et observations en perspective !
De l’autre côté, concernant la biodiversité « ordinaire », le tableau est clairement beaucoup moins réjouissant, on ne va pas se mentir… En effet, avec le règne de la loi du « progrès » fortement ancré depuis l’industrialisation, il y a beaucoup à faire pour changer les mentalités.
Voici quelques idées pour commencer par reconnecter à petite échelle :
- cultiver chez soi ou dans un jardin collectif, s’initier à la permaculture
- adhérer à une AMAP (Association pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne) et manger bio
- végétaliser son toit, sa terrasse, son balcon… ou même la rue !
- participer à une association locale de protection de la nature
- etc …
Crédit Photo : Filip Urban
Reconnexion à la culture
À l’époque actuelle, garder foi en l’humanité c’est parfois compliqué en écoutant les infos. Tout de même, voici quelques exemples pour reprendre espoir :
- Regarder le film Demain, de Cyril Dion et Mélanie Laurent (2015), pour rester dans le thème
- Lire la presse indépendante comme Reporterre, ou le Média Positif, ou s’abonner à la newsletter du Plongeoir
- Écouter les podcasts ou regarder les vidéos du journaliste Mamad, The Impact Story, dénicheurs d’initiatives positives partout dans le monde.
- Rire ! Oui on peut rire d’éco-anxiété, c’est même conseillé et Swann Périssé est spécialiste dans ce domaine (attention hautement corrosif !)
Bien entendu, cette liste est non-exhaustive.
« Il ne faut pas jeter bébé avec l’eau du bain ! » comme dirait mamie.
L’humanité a produits des milliers de choses incroyablement belles : des plaisirs les plus simples aux réalisations les plus complexes. Comment ne pas s’émerveiller en pensant à l’invention des instruments de musique, à la richesse des langues du monde, à la diversité des arts picturaux, à la minutie des différents artisanats, à l’émotion procurée par le cinéma…
Crédit Photo : Kevin Laminto
Nous sommes tous différents et la culture nous touche chacun.e d’une façon différente. Moi je retrouve ma sérénité en écoutant un bon morceau de jazz (Nina Simone, Sidney Bechet…) devant un tableau de Renoir, parée à dessiner une sculpture de Canova, habillée dans une robe cousue moi-même, avec un bon roman italien en poche et la perspective d’un délicieux repas (tout ça en même temps bien sûr)… et vous, qu’est-ce qui vous fait du bien ?
Reconnexion aux autres
Nous n’allons pas vous assommer d’une énième étude scientifique sur les bienfaits du lien social (bon si vous insistez voici un article intéressant sur le sujet avec de nombreuses sources), mais passer du temps avec les gens qu’on aime et qui nous aiment en retour, tisser et entretenir du lien, est une source de bien-être indéniable.
Vous pouvez aussi vous engager dans une association, faire une activité sportive ou créative en groupe, partir à la rencontre d’autres cultures en voyageant chez l’habitant…
Crédit Photo : PIKSEL (Getty Images)
Action !
L’éco-anxiété comme moteur
Reprenons les mots de Véronique Lapaige :
« Je me suis aperçue, dans le groupe multiculturel que je suivais à l’époque, que ce sentiment n’était pas uniquement négatif car il provoquait aussi une responsabilisation de ces personnes face aux changements planétaires. Or, si l’on veut combattre le réchauffement climatique, se sentir responsable est indispensable.
Il ne faut donc pas voir l’éco-anxiété uniquement comme un problème mais aussi comme un moteur pour changer les choses. »
(source : National Geographic)
Si l’on veut combattre le réchauffement climatique, se sentir responsable est indispensable.
Nos émotions sont des moteurs. D’ailleurs, le mot “émotion” vient du latin “motio” : “action de mouvoir, mouvement”. Alors utilisons nos émotions comme des leviers d’action !
« Ce sont elles qui nous ont guidé depuis la nuit des temps, et nous ont permis de survivre et d’évoluer. Redonnons-leur toute leur place, écoutons-les, réapprenons à vivre avec et grâce à elles !
C’est ce que nous dit si bien l’association On Est Prêt.
Une fois les « batteries rechargées », agir permet de créer un cercle vertueux libérateur !
Crédit Photo : Markus Spiske
Quelques idées pour transformer son éco-anxiété en actions
Les modes d’action sont nombreux, et il faut savoir trouver celui qui nous correspond, qui nous stimule sans augmenter notre niveau d’anxiété :
- voter (!)
- opter pour une banque qui n’investit pas dans les énergies fossiles
- essayer de mettre notre travail plus en accord avec nos valeurs
- choisir son mode de transport de façon écologique (marche, vélo, bus, tramway, train…)
- avoir une démarche zéro déchet (alimentation, cosmétique, entretien, habillement…)
- ramasser les déchets sur la plage ou en forêt
- sensibiliser son entourage à l’écologie en les emmenant à une Fresque du Climat (ou en animer!)
- soutenir des initiatives positives sur les plateformes de crowdfunding
- s’impliquer dans une association de protection de la nature
- s’impliquer en politique ou dans la désobéissance civile
- … etc !
Conclusion
En résumé, nos 5 remèdes contre l’éco-anxiété
- En parler et s’ouvrir aux autres
- Déconnecter des infos
- Reconnecter avec la nature
- S’aérer les neurones
- Agir concrètement
On peut faire tout ça en même temps ?
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Crédit Photo : Valentin Russanov